Comment les Tiers-Lieux révolutionnent-ils notre façon de travailler ?
Comment les Tiers-Lieux révolutionnent-ils notre façon de travailler ?
Mis au jour par le sociologue Ray Oldenburg en 1989, le concept de «Tiers-Lieu» (Third Place) fait référence à des espaces intermédiaires entre le domicile (First Place) et le travail (Second Place). Il s’agit de lieux laissant place à l’échange et à la créativité, et dans lesquels se constituent des communautés. Naturellement, le travail s’est invité dans ces espaces collaboratifs.
La généralisation du télétravail durant la crise sanitaire a encore accentué l’hybridation des organisations de travail et le besoin de lien social. Or, ces lieux alternatifs sont à même de répondre aux nouveaux besoins des travailleurs.
Mais qu’est-ce que c’est exactement? Comment redéfinissent-ils les organisations de travail? Quels en sont les avantages ?
Et surtout, comment s’habille-t-on pour travailler dans un tiers-lieu?
Qu’est-ce qu’on appelle un « Tiers-Lieu »?
Pour le sociologue Oldenburg, le tiers-lieu originel par excellence, c’est le café. Comme dans l’agora Athénienne, on peut y exercer une vie publique centrée autour de la conversation : psychologues de comptoir et experts en tout genre s’y côtoient et s’y expriment librement. C’est un terrain neutre, ni entreprise, ni domicile, au sein duquel règne une ambiance conviviale. Le tiers-lieu est une maison en dehors de la maison.
La notion a évolué pour faire naître de nouveaux espaces à mi-chemin entre le « chez soi » et le bureau. C’est dans la Silicon Valley qu’ont poussés les premiers tiers-lieux de l’ère digitale. Ils se sont ensuite particulièrement développés en Allemagne. Aujourd’hui la France n’est pas en reste avec une offre de plus en plus étoffée d‘espaces de travail polyvalents. Ces tiers-lieux deviennent de véritables concurrents de l’offre locative de bureaux traditionnels, voire du bureau d’entreprise.
Parmi ces espaces de travail hybrides, les espaces de coworking se présentent comme des espaces collaboratifs visant à favoriser l’échange. Ils sont constitués d’espaces multiples adaptés à différents besoins : espaces ouverts, salles de réunion, bulles, workcafés etc.
D’autres espaces, comme les « fablabs » ou « laboratoires de fabrication » ont la particularité de mettre à disposition des machines-outils pour concevoir et réaliser des objets en favorisant l’échange et la collaboration.
Certains cafés se sont mutés en tiers-lieux mixant le confort de la tisanerie avec des équipements dédiés au télétravail comme les connexions internet haut débit et de nombreuses prises USB. On y travaille obligatoirement installé dans un canapé avec un café macchiato-lait-de-soja-et-baies-de-goji devant soi.
Enfin, les centres de télétravail s’adressent aux salariés de diverses entreprises. On peut les inclure dans les tiers-lieux car ces espaces regroupent des personnes issues d’horizons différents qui peuvent se rencontrer et collaborer. Ces espaces sont des bureaux à mi-chemin entre l’entreprise et le domicile.
«Peut-on y travailler en pyjama ou en peignoir comme à la maison ou faut-il s’habiller en costume-cravate comme au bureau?» nous demanderez-vous. Nous serions tentés de répondre à cette question cruciale : « Venez comme vous êtes » (mais vêtus, quand même).
Quels sont les bénéfices du Tiers-Lieu pour l’organisation du travail ?
Les collaborateurs aspirent désormais à travailler «autrement» et c’est ce que traduit l’essor des tiers-lieux. Alors qu’on les imagine dédiés aux freelances-digital-nomades bronzés vivant entre les îles Thaïlandaises et Paris, la réalité est différente. En effet, 20% des utilisateurs sont des salariés de grandes entreprises et ces lieux alternatifs sont désormais aussi bien implantés dans les centres urbains que dans les territoires. Quels sont les avantages de ces lieux pour les travailleurs par rapport à leur domicile ou à leur entreprise?
Beaucoup de télétravailleurs se sont sentis isolés durant la crise sanitaire, même un ficus ou un chat ne suffisant pas toujours à tromper la solitude. Or, les tiers-lieux fonctionnent comme des espaces de rencontres et de mises en réseaux autour de valeurs communes. Ils ont vocation à maximiser le bien-être au travail dans une ambiance souvent joyeuse. On y laisse plus aisément éclore sa personnalité que dans les open-spaces ou les couloirs des entreprises!
Les conditions de travail dans ces lieux alternatifs sont plus favorables que celles du domicile. Alors que beaucoup de télétravailleurs n’ont qu’un coin de table dans leur salon pour travailler, le mobilier et les équipements des tiers-lieux sont pensés pour la vie professionnelle. D’ailleurs l’augmentation du nombre de télétravailleurs dans ces lieux alternatifs est significative. L’utilisation des tiers-lieux est un moyen de réduire les inégalités sociales, chaque salarié pouvant télétravailler dans de bonnes conditions quel que soit son type de logement. C’est également une bonne façon d’échapper à vos enfants qui ressentent souvent le besoin d’émettre leur avis lors de vos réunions en visioconférence.
Les tiers-lieux permettent également de réduire les déplacements domicile-travail. Un collaborateur peut choisir un espace de coworking près de chez lui et économiser ainsi un trajet en voiture, ce que la planète apprécie … Mais aussi le travailleur qui profitera d’une heure de sommeil supplémentaire. Moins de fatigue et de stress, c’est une meilleure productivité. Et plus de bonne humeur!
Pour les entreprises, l’un des critères décisifs est le prix puisque le poste de travail en tiers-lieu est inférieur de 42% à celui d’un bureau fixe traditionnel. Les comptables apprécient !
Enfin, la crise sanitaire a poussé de nombreux urbains à s’éloigner des grandes villes et à repenser leur mode de vie. La création de tiers-lieux dans les territoires les autorise à quitter les grands centres tout en maintenant une vie professionnelle active. Ces nouveaux espaces sont une voie de dynamisation des régions rurales et d’optimisation de leur attractivité.
Et si l’on organisait nos vies professionnelles autrement : lundi en pyjama dans votre salon, mardi-mercredi en costume-cravate au bureau, et jeudi-vendredi en short-espadrilles au coworking ?