Au bureau : qu’est ce qui cloche ?
2020 s’achève avec pour consigne gouvernementale de favoriser le télétravail partout où cela est possible. Cette année fut charnière pour l’organisation du travail, très fortement et brutalement bousculée à partir du printemps, au cours de ce que l’on appelle désormais «le confinement saison 1 ». La vie au bureau n’avait toujours pas repris tout à fait son cours, qu’un second confinement appelait les salariés à rester de nouveau à domicile. Si beaucoup apprécient de travailler à moitié habillés, de ne pas avoir à se maquiller ni à prendre les transports au petit matin, des études commencent à pointer les zones d’ombre de ce mode de travail à distance.
Si la plupart des télétravailleurs veulent continuer à travailler à distance, nombre d’entre eux indiquent avoir besoin de continuer à créer du lien social en présentiel, au bureau, et avec leurs collègues. D’autres estiment ne pas bénéficier des conditions adéquates chez eux, peu d’espace, pas de mobilier adapté, une famille envahissante …
Une enquête Harris Interactive réalisée du 4 au 8 novembre 2020 pour le ministère du Travail a notamment révélé que 58% des actifs ayant télétravaillé à temps plein souhaiteraient venir au bureau au moins une fois par semaine.
Alors, du télétravail mais pas trop ? Comment va-t-on travailler en 2021 ? Retournerons-nous au bureau ?
1- Le concept du bureau au fil des années
Et si on vous racontait une petite histoire ? Appelez-nous Père Castor pour l’occasion.
Si vous travaillez depuis quelques années, vous avez sûrement remarqué que les espaces de bureaux sont devenus de véritables pièces à vivre, évoluant avec les outils, la technologie mais également une certaine façon de concevoir le travail.
Les premiers bureaux ont vu le jour à la fin du 19ème siècle, avec l’essor de l’industrialisation. A cette époque de Taylorisme, les employeurs ont d’autres soucis que le confort des fesses de leur salariés ou les risques de troubles musculo-squelettiques, terme qui n’a d’ailleurs pas encore été inventé à l‘époque. Tout le monde bosse dans une seule grande pièce bien austère, sous surveillance de l’encadrement. Un peu comme pour une épreuve du bac.
Il faudra attendre l’après-guerre pour penser le bureau en des architectures et des décorations plus créatives. On invente alors les cloisons, appelées « bureau cubicule » (les fameux), pour réunir les salariés selon leurs compétences et favoriser leurs échanges. Hélas, revers de la médaille, l’utilisation de cloisons à outrance crée des labyrinthes géants tels de vastes clapiers à lapins. De quoi devenir fou et balancer sa machine à écrire contre la cloison du voisin !
Avec l’arrivée de la technologie vers la fin des années 70, on détricote tout pour revenir aux grands plateaux. Vous commencez à la sentir l’histoire qui se répète ?
Il faut attendre les années 2000, et plus particulièrement 2010 pour que la prise de conscience se fasse : l’aménagement des bureaux a une incidence sur le bien-être des travailleurs ! Aujourd’hui, suivant le mouvement des Google et autre Facebook, les espaces de bureaux se réinventent totalement. L’idée est à la fois de créer des lieux de vie esthétiques et pratiques, de séparer les espaces de loisir et de travail mais aussi de développer la flexibilité, avec des bureaux non-attitrés. Un peu comme un exotique « digital nomade », ou un co-worker branché.
D’accord mais avec la crise sanitaire, on a vu que le télétravail se développait, alors ça vaut encore le coup d’investir dans de beaux espaces de bureau ?
2- Organisation du travail : que se passera-t-il demain ?
Cette question est légitime.
En effet, la crise du coronavirus nous a permis de repenser notre rapport au travail. C’est l’occasion de se demander : pourquoi faut-il se rendre au bureau quand on peut rester dans son canapé vêtu de son plus beau pyjama en pilou ? Soyons honnêtes, les lieux de travail n’étaient guère appréciés et plus personne n’a envie de faire une heure et demie de trajet pour aller au boulot tous les jours. Pour autant, il est utile pour des salariés de se retrouver, et pas seulement pour la convivialité qui est un facteur important, mais parce que certaines réunions et les échanges informels sont plus efficaces en présentiel. Seulement, si l’on ne va plus au siège que pour des réunions, est-ce vraiment utile d’investir autant dans des espaces personnels ? L’open space doit s’adapter et évoluer !
Si le télétravail a connu un formidable coup d’accélération grâce ou à cause du premier confinement, qu’il est reconnu que les télétravailleurs sont productifs, on expérimente aujourd’hui les limites d’une telle pratique.
D’après l’étude Harris Interactive, 25 % des actifs estimant pouvoir télétravailler rencontrent pour cela des difficultés. 4 télétravailleurs sur 10 se sentent isolés et 30 % déclarent mal vivre ce travail à distance au quotidien. Ce mode d’organisation continue de se développer mais à 100 %, il provoque une véritable dispersion du personnel, une dilution de l’esprit d’équipe et de la culture d’entreprise. Sans compter que ces méthodes ne conviennent tout simplement pas à tous les salariés.
Alors quoi ? Alors en 2021, une organisation mixte de travail se mettra sans doute en place, avec du télétravail (sûrement encore beaucoup) et des journées en présentiel. Le bureau est le lieu où l’on se nourrit de l’énergie de ses collègues, où l’on échange de manière informelle autour de la machine à café, où le travail en équipe s’épanouit. La créativité, l’inspiration et la vision commune ne peuvent se développer avec des entités isolées. Le bureau reste, encore aujourd’hui, un lieu de connexion à l’autre, indispensable pour maximiser le potentiel de chacun.
Pour conclure :
Alors que le métro-boulot-dodo minait nombre d’employés ou de cadres, le télétravail pourrait nous aider à repenser notre rapport à l’espace de bureau. On ne vient plus s’y ennuyer 8 heures par jour, mais y trouver du lien social, partager ses idées au cours de réunions et de brainstormings, se rendre visible. Adieu les 6 « calls » à distance par jour perturbés par les problèmes de connexion, et bonjour les points en présentiel, plus efficaces. Le bureau ne sera plus un lieu de cloisonnement mais celui où se développent la créativité et la vision d’entreprise. A se voir moins, on aura plus de plaisir à se retrouver. Selon l’ONU, la semaine idéale comprend 2 à 3 jours de télétravail, le reste du temps, vive la pause-café dans l’espace Tisanerie, ou la pause-déj sur la terrasse du 4ème !
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